vendredi 27 septembre 2013

Désormais nous avons un défenseur en haut lieu.

Un sentiment de colère monte lentement, une colère rétrospective. 
Le mal qu'on nous a fait à travers les papautés de Jean-Paul II et Benoît XVI !!
Trente-cinq années de conservatisme religieux. Plus encore, si l'on inclut la condamnation de la contraception (1968). Quarante-cinq ans !!
Je suis convaincu que ces hommes ont fait au mieux selon leur conscience, mais pour nous, quel massacre !

Le mal que ce conservatisme a fait au monde et à l'Eglise !
Ici en Occident, les églises se sont vidées, j'ai vu mes parents, mes frères, toute ma famille (fort nombreuse) déserter une Eglise incompréhensible, culpabilisante, reine de jugements mais pas de miséricorde.

Le mal qu'on nous a fait !!
Mais tout ça c'est fini.
Nous avons maintenant un avocat, qui remet les pendules à l'heure et les choses dans le bon sens :
   «L'annonce de l'amour salvifique de Dieu est premier par rapport à l'obligation morale et religieuse. Aujourd'hui, il semble que prévaut l'ordre inverse.»
   «Nous ne pouvons pas insister seulement sur les questions liées à l'avortement, au mariage homosexuel et à l'utilisation de méthodes contraceptives. Ce n'est pas possible.»
   «Celui qui aujourd'hui ne cherche que des solutions disciplinaires, qui tend de manière exagérée à la “sûreté” doctrinale, qui cherche obstinément à récupérer le passé perdu, celui-là a une vision statique et non évolutive. De cette manière, la foi devient une idéologie parmi d'autres.»

L'Eglise doit maintenant démonter, à sa porte, le portail de sécurité que l'on avait érigé, qui scrutait les gens sur leur vie. L'Eglise veut avoir avec les gens le même rapport que Jésus avait : non pas le jugement, mais l'intelligence des situations; non pas d'abord la doctrine, mais la main fraternelle !  C'est la miséricorde que je veux, et non les sacrifices !

Et puis, je pense à ceux qui sont d'opinion contraire, et qui vont souffrir, maintenant que le pape n'est plus un conservateur. A leur tour ils vont dire : "Quel mal on est en train de faire au monde et à l'Eglise !" Tous ces conservateurs que je n'apprécie guère, mais qui sont mes soeurs et frères... il faudra prendre soin d'eux.

L'Eglise veut d'abord être une maison où l'on accueille chacun, chacune, avec ses joies et ses aspirations, ses tristesses et ses angoisses, avec ses talents, sa créativité, avec les accidents de sa vie.

Depuis que François est évêque de Rome, l'air est plus léger. Il flotte une allégresse, comme un parfum de bénédiction sur tous. Certains relèvent la tête. D'autres veulent voir plus d'actes décisifs pour y croire.

Moi, mon coeur se prend à tressaillir.
Une ère nouvelle semble s'ouvrir, un jour nouveau se lève.

mardi 7 mai 2013

Ils m’ont appris la fierté

Je viens d’une culture du ricanement. Je sais déceler ces petits défauts chez les autres, ces tares mineures que je monte en épingle pour moquer, pour faire rire, pour briller.


La bible n’est pourtant pas tendre avec «ceux qui ricanent». J’ai ricané tant et plus sur «les américains». Ne sont ils pas ridicules avec ces drapeaux partout ? Certains en on même un à l’entrée de leur maison ! Et leur patriotisme ! Et la main sur le cœur lorsque retentit l’hymne national ! Heureusement, nous avons dépassé ça ! Et les pom-pom girls ! Et leurs cérémonies de remise de diplôme – avec leurs chapeaux ridicules !


Oui mais voilà, je ricane moins. Je suis profondément touché par leur amour de leur pays, de leur peuple, de leur terre. Je suis ému par leur respect de l’hymne national. Je comprends la force qui se dégage de la fierté. L’honneur, le service, ce sont des mots vieillis chez nous. Pire – leur sens est raillé. Ici ces mots ont beaucoup de sens.


Mes parents sont venus pour la cérémonie de remise de diplômes. Ils en sont sortis enthousiastes. «Pourquoi avons-nous perdu ça ? Il y avait une telle joie sur les visages de tous ceux qui étaient diplômés !» Une certaine culture de la fierté. Ça ne se fait pas du tout chez nous. En France, on ne met pas en avant ses diplômes, c’est de mauvais goût, c’est vulgaire. Ici au contraire on est fier de ce que l’on a accompli, et on le manifeste sans complexe. Est-ce de l’enfantillage ? Il me semble que cette fierté épanouit les talents.

Qu’avez-vous à regarder vers le ciel ? Il n'est pas ici.

Durant mes études j’avais été fort impressionné par la théologie d’Irénée de Lyon :
L’incarnation du Christ n’est pas un relèvement de la chute.
Création et incarnation sont un seul et même projet, dès l’origine.

« Dieu s'est fait homme pour que l'homme devienne Dieu. »
« La Gloire de Dieu c’est l’homme vivant, et la Gloire de l’Homme c’est de voir Dieu. »

Pas d’autre lieu ni médiation que l’humanité pour chercher Dieu. Un inouï de Dieu. Même les justes ne l’ont pas vu. Il y a là vraiment une révélation.

Voici typiquement ce que je voudrais contester : « Le péché a bloqué le projet divin. L'incarnation vient guérir. » Je voudrais ensuite en tirer les conséquences sur les notions de Rédemption, de Mission, d’Esprit-Saint.



Je dois non m’élever au ciel, mais m’abaisser à la terre.
On n’a pas voulu comprendre la radicalité de l’incarnation, on n’a pas voulu comprendre que Dieu est entré dans la chair, Bérulle nous aide à en percevoir les conséquences : Hommes de Galilée, qu’avez-vous à regarder vers le ciel ? Il n’est pas ici. Il vous précède en Galilée. »

« [Dieu] se fera chair, et la chair est terre en son issue, en sa substance et en son origine […] ce n’est plus le ciel qui régit la terre, mais c’est la terre qui régit le ciel ; et le premier mobile n’est plus ès cieux mais en la terre, depuis que Dieu s’est incarné en terre. […] « Or en ce mystère je dois changer de méthode ; je dois non m’élever au ciel, mais m’abaisser à la terre, car Dieu y est […] Dieu incarné n’est pas au ciel et il est en la terre ; Terre hélas ! qui possède un si grand trésor, et le possède sans le connaître. Puisque Dieu cherche la terre, aime la terre, je veux me convertir maintenant non au ciel, mais à la terre, et y chercher Jésus Christ.»    Pierre de Bérulle



Rédemption, Salut
Si l’incarnation a sa source non dans la chute mais dans le projet de Dieu, alors qu’est ce que la rédemption ? Ce n’est ni un rachat ni une rançon ; ce n’est plus sauver l’Homme du mauvais, c’est un compagnonnage amoureux, une élévation de l’Homme, au dessus du mal et des humaines errances ?

Comment revisiter les mots : sauvé, salut, rédemption, rançon, rachat, chute, péché originel… Dans St Jean, par exemple, « Ta foi t’a sauvé » se dit de celui qui n’est plus aveugle, qui n’est plus boiteux, qui n’est plus malade… Jésus conteste clairement le lien entre maladie et péché : Qui a péché ?!? Ni lui ni ses parents, mais c’est pour que soit manifestée la Gloire de Dieu. » Il semble que pour St Jean, sauvé ça veut dire egeiren : relevé, suscité, éveillé.

Il faudra alors chercher à expliquer d’où vient le mal. Pas de raison de contester le lien entre le mal et la liberté humaine. Mais de même qu’il fallait que le Christ souffrit pour que soit manifestée la plénitude de la vanité de la haine, de même il fallait que le temps de la création de l’Homme-et-Femme précède celui de l’incarnation, afin que soit manifestée la plénitude de la liberté humaine, image et fruit de la perfection de l’amour créateur.



La mission change elle aussi de perspective. La Mission, c’est d’aller dire à tous qu’il n’y a rien à craindre de Dieu. C’est une annonce libératoire … La Mission, c’est aller dire qu’on nous aura menti, que Dieu n’est pas ce que vous croyez, Dieu ne se fait pas juge, et Christ vient révéler ça, on n’est plus dans une théologie de la rétribution. Vous n’avez désormais plus à vivre selon la Loi mais selon la Grâce. N’ayez pas peur. Il n’y a pas de condamnation. « Je ne suis pas venu pour juger, … mais pour que vous ayez la vie en abondance. »

La mission est un envoi, parce que, de même que Dieu crée, se manifeste et se révèle en sortant de lui-même, de même l’humain, qui se révèle dans l’envoi, dans la sortie. Dieu se révèle en envoyant son fils. Et le fils comprend qui il est, en étant envoyé.
Le fait d’être envoyé, c’est ça qui nous révèle ce que nous sommes. L’envoi est une étape de révélation. Et cette révélation manquera si nous ne faisons pas cet effort de sortir vers « ces rencontres qui nous transforment »

Il y a donc un lien fort entre mission et envoi. La Mission ne consiste pas en un témoignage mais en un envoi. Et en effet, le pape François, nous invite à aller aux périphéries de l’existence et de la société. Sortie de soi, aller chez l’autre,



L’Esprit Saint procède lui aussi de l’incarnation. L’Esprit murmure depuis les situations humaines. Il est résidance de Dieu en nous (habitation, demeuration). Cette demeuration fait de l’Homme un temple de Dieu.
L’incarnation est donc à la fois Chair et Esprit.

Or Saint Paul oppose Esprit et Chair (Sarx, contingence, régime de la Loi, pâte humaine). La chair, c’est la condition de l’Homme sans l’Esprit. L’œuvre néfaste de la Chair, c’est la peur.
Pour Paul, vivre selon la « chair » équivaut à se remettre sous la Loi.
Loi et peur ont partie liée. La Loi cause la perte de l’Homme. Car l’ennemi de la Foi, ce n’est pas le doute, mais la peur. L'opposition entre Chair et l'Esprit est liée à l'opposition entre la Loi et la Foi.

C’est l’Esprit qui vivifie en nous la Ressemblance, et nous fait désirer d’agir par amour. Il nous permet de voir la détresse de l’autre, il suscite la compassion. Il nous fait percevoir les appels de Dieu et du Monde. Lorsque nous écoutons les appels de l’Esprit, nous discernons l’attitude juste, les justes combats ; nos décisions sont éclairées.

L’Esprit est un défenseur, un avocat. Au contraire, le diabolo - le diviseur – nous divise entre nous, et nous divise à l’intérieur de nous-mêmes. Nous ne savons plus choisir selon la ressemblance, selon l’unité, mais nous choisissons sur le mode séparé, égoïste, sur le mode de la défense du territoire, comme l'animal. L’accusateur sape la confiance en l’autre et la confiance en soi. Le défenseur au contraire, murmure « ne crains pas, l’accusateur n’a sur toi aucun autre pouvoir que ceux que tu lui cèdes. »

mardi 19 février 2013

La recherche commune de la Mission de France


Dans le journal intime de Cécile
- Ah ! tu es de la Mission de France ?
- C’est les prêtres ouvriers, c’est ça ?
- Ça existe encore ??
- Mais puisque tu n’es pas prêtre, tu y fais quoi ?
- La quoi ??  la coresponsabilité missionnaire ??  Alors tu es une missionnaire ??  Tu essayes de convertir les gens sur ton lieu de travail ?

Non, je n’essaye pas de convertir les gens sur mon lieu de travail. Mais si au moins je pouvais être une femme du seuil : le pied dans la porte, pour empêcher que le monde ne ferme la porte sur Dieu… Au bureau, on ne parle presque jamais de Dieu, sauf pour savoir ce qu’on a le droit de manger en période de Carême. Ça me déprime d’entendre l’étroitesse de ces allusions. Dieu n’a-t-il de place que dans des prescriptions alimentaires ?  Pauvre Dieu… tant d’amour incompris…
On s’est mis à réfléchir en équipe, en région. On nous a envoyé un fascicule pour la Recherche Commune, le premier d’une série de trois. Ça commence avec un travail de mémoire sur nos situations concrètes. Il s’agit de raconter, de partager, de réfléchir, de discerner.  Ensuite on cherche des échos dans des textes, des vidéos, des œuvres d’art, des chansons, des poèmes, des témoignages… ils ont proposé plein de pistes pour « nourrir » la réflexion. 
Le sujet n’est pas facile. Ils appellent ça « Porter la Question de Dieu ».  Ils me font rire avec leurs expressions. Comme si on pouvait porter la question de Dieu... En réalité, elle pèse plus lourd qu’on ne croit, la question de Dieu.  Il faut sans cesse la relever. Elle est bien souvent au sol, ignorée, ou même piétinée. 
Ça me surprend toujours.  Dieu est ignoré la plupart du temps, sauf quand il arrive un malheur.  Et alors c’est l’accusation. A l’association Familles Monoparentales, elles me disent : « Si Dieu existe, pourquoi n’a-t-il pas empêché tout ça ? Tu prétends que Dieu nous aime, alors pourquoi il nous arrive tous ces malheurs ? » Elles prennent Dieu pour une assurance-vie.  J’essaye de leur dire « Dieu n’est pas ce que vous croyez », mais ensuite elles me demandent : « Alors Dieu c’est qui, c’est quoi ? » Et généralement au bout de deux minutes on ne m’écoute plus.  C’est plus facile de dire ce que Dieu n’est pas, que de dire ce que Dieu est pour moi.
Ils ont fait un site internet, une « plateforme » comme ils disent, avec des ressources multiples, des voix du monde, les voies des marcheurs de Dieu.  Moi qui ne suis pas trop à l’aise avec internet, je ne sais pas comment je vais accéder à toutes ces ressources. Je demanderai à ma petite voisine de m’aider.
Je ne suis pas trop à l’aise non plus pour écrire… alors je me suis dit que j’allais me faire interviewer par mon beau-frère : je raconte - il note des choses - il m’interrompt si c’est pas clair - et à la fin on reprend ses notes pour écrire quelque chose. 
En équipe, on a repris les récits de chacun. C’était très riche et intéressant. Ça nous fait découvrir une incroyable diversité de façons de « porter la question de Dieu ».  Et de là, on a regardé les dix voies possibles, qui résonnent avec notre expérience.  On s’aperçoit que ça nous fait dialoguer avec l’expérience de certains grands spirituels, et même avec le récit biblique ! Pour moi, je me suis trouvée tellement proche du philosophe Compte-Sponville !  Et j’ai été beaucoup inspirée par la chanson Toi que l’on n’homme pas de Jean-Louis Aubert.
Ensuite on s’est mis à rédiger une « contribution » pour l’envoyer à la Mission de France.  Ils en feront ce qu’ils voudront. On a essayé de faire bref et synthétique. Certains d’entre nous ont voulu envoyer leur propre texte, parce qu’il était court.  Ça permettra à l’équipe de pilotage de la Recherche Commune de rebondir sur ce qu’on leur envoie, pour engager l’étape suivante.
Tout ça c’est du travail : pour moi, pour notre équipe, pour le groupe de pilotage. Mais à chaque fois j’en ressors plus éclairée, et désireuse d’aller dire à tous que le Royaume s’est approché de nous.

lundi 14 janvier 2013

Dernier adieu, au cimetière


Seigneur Jésus-Christ, avant de ressusciter, tu as reposé trois jours en terre. Et depuis ce jour, la tombe des humains est devenue, pour les croyants, signe d’espérance en la résurrection.
Nous te rendons grâce, Seigneur, de nous avoir donné Ariane. Nous venons la remettre entre tes mains.

Au moment de porter Ariane en terre, nous te prions de lui donner de reposer en paix jusqu’au jour où, tous, tu nous appelleras à la vie sans fin. Par le Christ notre Seigneur, Amen.

Bénédiction pour funérailles

Notre célébration va bientôt se terminer.
Nous terminons par un geste d’au-revoir.  Chacun fera le signe qui lui convient, certains pourront utiliser le signe de la croix et l’eau du baptême, d’autres poseront la main sur le cercueil ou l’embrasseront, d’autres se recueilleront un instant, que chacun fasse le signe qui lui convient. Puis nous quitterons l’église et nous rendrons au cimetière.



O Dieu, nous te présentons toute la vie d’Ariane
Nous t’offrons cette richesse de vie, et nous te prions…
Ariane n’est plus avec nous, Nous venons la remettre entre tes mains. Qu’elle soit dans ta lumière.

Par l’eau du baptême tu as tracé sur elle le signe de la Vie, conduis-la à bon port. Et que, selon ta parole, elle trouve place en ta demeure, auprès de toi.
Nous t’en prions, toi qui demeures dans les siècles des siècles. Amen.

Oraison pour funérailles

Nous te prions Seigneur Dieu, devant ce mystère de la mort, dont nous ne savons pas avec certitude s’il ouvre sur le néant ou sur l’éternité ?
De certitude nous n’en avons pas, mais nous avons mis en toi notre confiance, notre espérance.

En ce jour d’adieu, nous te prions de tourner nos cœurs et nos mémoires vers ce que nous avons reçu d’Ariane. Aide-nous à rassembler ces trésors, à les lier en gerbe, et à les poser devant toi pour te dire merci.

En nous séparant d’Ariane, en la laissant partir, nous te la confions.
Bénis Ariane, Seigneur Dieu. Telle est notre prière en Christ, le vivant dans les siècles des siècles. Amen.

Je te prends avec moi, afin que là où je suis, là aussi tu sois.

Certains disent : « Je ne parviens pas à croire, je le souhaiterais mais je n’y parviens pas. » Et à l’occasion de la mort, ils disent encore « J’envie l’espérance des chrétiens, mais je ne peux pas croire à la résurrection. »  Avec la mort de ceux que nous aimons, vient la question : « Où sont-ils maintenant? Les reverrons-nous ? »

Evangile de Jésus Christ selon Saint Jean - Chapitre 14

A l'heure où Jésus passait de ce monde à son Père, il disait à ses disciples : « Ne soyez donc pas bouleversés : vous croyez en Dieu, croyez aussi en moi.  Dans la maison de mon Père, beaucoup pourront trouver leur demeure, sinon, est-ce que je vous aurais dit que je pars vous préparer une place ?  Quand je serai allé vous la préparer, je reviendrai vous prendre avec moi; et là où je suis, vous serez aussi. »


« Ne soyez pas bouleversés » dit Jésus.
Mais comment ne pas l’être ?
Voilà qu’au moment où nous sommes dans la peine, nous proclamons un texte qui dit « ne soyez pas bouleversés ».
Est-ce étrange ?
Est-ce nier la réalité de la mort ?

Il s’agit pour nous de mettre la mort à sa place.
Nous n’essayons pas de nier la mort, nous essayons de nous tenir debout, comme des vivants qui acceptent de tenir dans nos deux mains la vie et la mort.
Tenir à la fois la vie et la mort, c’est tenir à la fois notre vulnérabilité et notre grâce.

Car l’humaine nature est passionnante. Elle est extrêmement talentueuse, créative, aimante. Et aussi elle peut être égoïste, agressive, dominatrice, destructrice. Voilà l’humain.
Parfois la race humaine apparaît dans son incroyable noblesse, parfois dans sa misérable vanité.
Entrer dans la maturité de l’expérience humaine nous fait entrer dans cette nuance : en acceptant de poser un regard nuancé, sur l’humain qui n’est ni tout noir ni tout blanc.

En acceptant de tenir dans nos deux mains la grâce et la pesanteur, la présence et la séparation, nous entrons dans la réalité complexe de l’humain, nous acceptons de ne pas simplifier, mais au contraire, nous acceptons que l’instantané n’est pas le tout de notre réalité. Nous choisissons de porter notre regard au-delà de l’immédiat.


Beaucoup d’entre nous disent « je ne parviens pas à croire, je le souhaiterais mais je n’y parviens pas. Et à l’occasion de la mort, disent encore « J’envie l’espérance des chrétiens, mais je ne peux pas croire à la résurrection. »

Pour ceux qui croient en la résurrection, l'existence n'est pas le point final de la vie.
Dieu suscite de nouveau l'être, d'une façon que nous ne savons pas. Dans la foi, nous confessons que le Christ a vaincu la mort, qu'il s'est levé du tombeau, premier-né d'une multitude.
Mais comment s’en convaincre si l’on ne peut pas y croire ?

Pour ma part je n’ai pas de certitude,
Je n’ai pas de savoir ferme, pas de preuve, mais seulement un choix,
Le choix de la foi.
Ma foi et bousculée, mais elle cultive en moi le ‘peut-être’

Peut-être que c’est vrai qu’ils ont vu Jésus ressuscité.
Peut-être que c’est vrai que Dieu existe et qu’il appelle les vivants à la confiance, et qu’il nous emmène au delà de notre mort.

Si c’est vrai, alors ça change tout. Ça change le sens de la mort, ça change la perspective de l’existence humaine.
Qu’avons-nous à notre disposition pour douter de la résurrection de Jésus ?
Il faut envisager soit une falsification des témoignages, soit un délire collectif touchant une vingtaine de personnes de l’entourage de Jésus.

C’est possible. C’est possible que ce soit une hallucination collective,
C’est possible aussi qu’une falsification ait pris place dans l’entourage de Jésus. Ce serait d’ailleurs assez cynique qu’ils aient choisi de prêcher par un mensonge un Christ qui est le Chemin, la vérité et la vie.

A l’inverse, il est possible d’accorder foi à leur témoignage.
Peut-être que Oui il s’est levé de la mort, et peut-être que Oui nous sommes promis nous aussi à nous lever de la mort ?

Avec la mort de ceux que nous aimons, vient la question : où sont-ils maintenant? Les reverrons-nous ?
Oui, autre chose est en germe, dont l'heure n'est pas encore venue.

La plus belle analogie est celle de la Chrysalide du papillon. Elle semble morte, recroquevillée. Pourtant il en sortira une beauté jamais imaginée, une légèreté qui n'a aucune commune mesure avec la vie rampante de la chenille.

Autre analogie, celle de la graine et de l’arbre. Il y a une telle démesure entre eux! Mais si la graine ne meurt, comment pourrait-elle pousser et finalement porter du fruit? Tombée en terre, elle disparaît à nos yeux. Mais la vie est à l'œuvre.

Dans cet évangile, Jésus dit : « A nouveau je viendrai – je vous prendrai auprès de moi – afin que là où je suis, vous aussi vous soyez. »
Je vous souhaite, comme je le souhaite à Ariane, d’entendre dès aujourd’hui pour vous cette phrase de Dieu : je te prends avec moi, afin que là où je suis, là aussi tu sois.

samedi 5 janvier 2013

How a shepherd visited us


"There were shepherds, living in the fields, watching over their flocks." (The nativity, in Luke's Gospel) 


Nowadays it is still the case.
I traveled frequently through Africa, Maghreb and Palestine; I saw people watching over a handful of sheep and goats. They were often poor people, often children.

Also in Paris, in the middle of the big city, you find poor shepherds.
Here is how one of them came to my parent’s home, on Christmas eve, and sat at our table, sharing with us the champagne and the foie gras, the oysters and the salmon, in the light of the silver chandelier and of the Christmas tree.

It happened when I was around 25 years of age, I was serving in the civil service because I was a consciencious objector. I refused to serve in the military. I served two years instead of one. I chose to serve in a shelter for street boys, in Paris.

One day I found a boy, Franck. He was sitting and begging at the entrance door of the Galleries Lafayette. He was very young, maybe 20 years old, he was dirty, and obviously homeless. I sat next to him and we began to talk. He was a poor uneducated boy, not handsome, skinny, but he was joyful and had many dreams he wanted to achieve. We talked for a long time. Then I gave him the address of our shelter. Later on, he showed up. I took care of him, He got new clothes from the women in the shelter, got Metro tickets, and got hot meals. And I loved to spend time with him and watch him get better.

Christmas was approaching. At that time, I did not live with my parents any more, but Christmas was a time when we would gather at their home together with my three brothers. I was a little concerned about the selfishness of having, year after year, Christmas Eve just among ourselves. Therefore I asked my parents if we could have Franck invited. They accepted it, although reluctantly.

That night, I brought him. He had never been in a house like ours. He had never known such a dinner. He instantly loved my parents and my brothers. He was so happy !
He was the enlightment of that night.

My brothers had presents for him, and he also had brought presents, very modest, and at the same time very touching. My family remembers that Christmas Eve above all !
The shepherd visited us. He brought us the blessing. When I remember this night, my heart rejoices and sings.

Glory to God in the highest – and peace to his people on earth.

vendredi 4 janvier 2013

Solitude d'apôtre


Comme une sentinelle,
comme un envoyé,
il faut aller seul,
d’une solitude
qui permet l'intime, et l'élévation.

Il sont allés seuls, afin d'être vulnérables,
seuls, afin d'être déstabilisés,
seuls, exposés à l'amertume,
seuls comme Dieu est seul,
   trouvant ses délices
      dans la compagnie des humains.



Comme une sentinelle,
     prudente - attentive - observant les positions de l'autre,
comme un envoyé,
     cherchant à nouer le lien - diplomate - chargé de mission,
il faut aller seul,
d’une solitude
qui permet l'intime de la rencontre, et l'élévation de l’échange.

Il sont allés seuls, afin d'être vulnérables,
     afin d’être contestables, de n’être pas des sachants,
seuls, afin d'être déstabilisés,
     obligés de rechercher leurs références, leurs appuis,
     obligés d’entendre quel sens l’autre donne, selon ses valeurs ;
seuls, exposés à l'amertume, de ceux que l’espérance a déçus,
     ceux qui en ont gros sur le cœur, mais n'ont personne à qui le dire,
     ceux dont l'église s'est éloignée.

Seuls comme Dieu est seul,
     car Dieu ne s'avance pas comme une certitude,
     mais comme une confiance, un « si tu veux. »
     et l’apôtre se nourrit du même désir que le Christ,
trouvant ses délices dans la compagnie des humains. (Proverbes 8,31)